Parmi tous les sujets brassés par les organisations syndicales, certains sont plus habituels que d’autres. Les salaires ou les conditions de travail figurent au premier
rang, mais il en existe d’autres qui, dans l’ombre, sont très importants en raison du danger qu’ils présentent pour notre avenir. L’EDIP fait partie de ceux-là.
EDIP : European Defence Industry Programm
Cet acronyme désigne une négociation qui se déroule dans l’ombre des bureaux feutrés de la commission européenne, à Bruxelles. Ce programme, financé par les contribuables européens (nous) vise à stimuler les capacités industrielles européennes de la Défense. En clair, il s’agit de financer les programmes de développement de la défense militaire du futur, à échéance longue, 20-30 ans.
La Commission Européenne dispose pour cela de ressources de financement (nos impôts !) qui sont autant de moyens de convaincre des États n’ayant pas une grande
autonomie, en particulier dans l’aéronautique militaire, et qui pourraient y voir là le moyen facile de financer et développer du matériel.
Vous vous demandez en quoi cela vous concerne ?
Si la société Dassault Aviation se porte aussi bien c’est parce que le carnet de commandes du Rafale est plein pour 10 ans. Ce carnet de commandes garantit nos
emplois actuels comme nulle part ailleurs et il permet d’embaucher, des ouvriers, des techniciens et des ingénieurs, dans un secteur de pointe. Ce n’est pas rien !
Mais savez-vous POURQUOI de plus en plus de pays choisissent le Rafale pour remplacer leur flotte d’avions militaires ? Pas seulement TECHNIQUES, les raisons
sont également en grande partie POLITIQUES :
Les pays qui choisissent le Rafale plutôt qu’un avion américain le font de manière très réfléchie : Le Rafale est un avion « ITAR free » (International Traffic in Armes
Regulations free) : c’est-à-dire sans pièces américaines, ou plus précisément sans aucun composant susceptible de bloquer l’export de l’avion par simple opposition du gouvernement américain.
Acheter un Rafale c’est donc rester indépendant de l’état américain pour sa défense nationale… rester indépendant des USA dans son propre pays, garder sa
souveraineté, n’est pas un petit sujet !
Les plus gros marchands d’avions militaires au monde, sont aux USA. Un pays qui se pare d’une façade de liberté et de démocratie. En réalité les USA sont une
incroyable machine de guerre économique et commerciale. Tout s’achète, se vend et se négocie avec une rage commerciale inouïe : les lois, les tribunaux et l’armée
font bloc autour du mot d’ordre : « America First ». Eux défendent leur souveraineté !
Pour un pays, quel qu’il soit, rester indépendant des USA pour sa défense nationale permet de tenir tête aux USA sur bien d’autres sujets de négociation, notamment
commerciaux. C’est un atout fort.
« Bon ok tout ça je le sais déjà, mais alors cette négo EDIP à Bruxelles, en quoi ça me concerne ? »
Déjà, il s’agit de l’utilisation de nos impôts.
Ensuite, si négocier et coordonner les pays européens entre eux pour mettre en place des programmes d’équipement communs peut partir d’une bonne idée, il faut quand même rester attentif : comme toujours le diable se cache dans les détails :
Cette négociation menée par la commission européenne est en réalité pilotée par les allemands. Ne produisant pas d’avions « ITAR free », les allemands ne sont donc
pas concernés par ce « détail » et souhaitent accepter de financer des programmes incluant des composants américains presque sans aucune restriction !
Au contraire de défendre la souveraineté européenne, les négociateurs allemands « tuent » l’idée même de futurs programmes européens « ITAR free ». Pourquoi ?
Parce qu’en réalité ils défendent avant tout leurs intérêts nationaux allemands ! Ils souhaitent en premier lieu garantir leurs accords commerciaux qui leur permettent
d’exporter facilement leurs berlines luxueuses aux USA ! Cette négociation est donc menée à l’encontre des intérêts de la souveraineté française, et même européenne !
Pour la CGT, s’il doit y avoir un accord pour une industrie de l’armement européenne, elle doit faire en sorte d’être 100% « ITAR free » sans quoi cela n’aurait aucun sens ! Ce sujet peut paraitre « loin » a beaucoup mais ne nous y trompons pas : il s’agit là de discussions pouvant anéantir notre industrie et nos emplois de demain !
Beaucoup l’ont oublié mais si le Rafale existe aujourd’hui c’est parce que les élus CGT Dassault, fortement soutenus par les salariés, ont défendu l’idée d’un avion franco-français dans toutes les instances politiques au tout début des années 80 ! L’histoire se répèterait-elle ?